La connaissance de l’Asie en France va être bouleversée à la fin du XIXe
siècle par des voyageurs fortunés et cultivés qui fuient l’Europe aux anciens
parapets et se rendent en Asie tantôt en mission d’exploration tantôt en
voyageur dilettante. Henri Cernuschi (1821-1896) se découvrira au Japon une âme
de collectionneur avisé ; parti en voyage autour du monde avec son ami
Théodore Duret, il séjourne en Chine, au Japon, en Inde et au Sri Lanka. Il met
au profit son séjour au Japon et en Chine pour acheter de très nombreux objets
dont quelques rares bronzes antiques qu’il choisit dans la perspective d’une
collection d’art asiatique. Il fait aussi venir du Japon en France le grand
Buddha Meguro, statue du Buddha Shâkyamuni ; autour de ce bronze colossal
réinstallé par le sculpteur Barbedienne, il organisera le musée qui porte son
nom dans un hôtel particulier de l’avenue Vélasquez, qu’il fait construire à
cet effet.
Dans la même génération et animé aussi par la soif de la découverte,
Emile Guimet part vers l’Extrême-Orient en compagnie du peintre et dessinateur
Félix Régamey. Son intérêt se porte vers les religions, et plus principalement
le bouddhisme qu’il côtoie longuement au Japon où sa mission lui permet des
échanges avec des hauts dignitaires religieux qui se prêtent à son
questionnement. Du Japon, Guimet rapportera une importante collection de
représentations religieuses qui viendront se joindre à celles venues d’Egypte
et du monde méditerranéen antique dans le musée des Religions qu’il fonde
d’abord à Lyon, sa ville natale, puis à Paris, sur la colline de Chaillot, en
1889.
En 1888, Charles Varat, explorateur lui aussi mandaté par le ministère
de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, découvre la Corée restée pendant
des siècles totalement fermée aux étrangers « sous peine de
mort » ; il en rapporte le premier témoignage ethnographique sur ce
pays de vieille culture ainsi que des « collections scientifiques »
qui contribuent à la création, en 1893, de la galerie coréenne du musée Guimet
ouvert depuis peu.